Tous les écoliers britanniques connaissent Guy Fawkes et le Gunpower Plot. Le 5 novembre 1605, dans des caves situées juste sous le Parlement de Londres, on découvre des dizaines de barils de poudre prêts à exploser, gardés par un individu du nom de Fawkes. Né dans une honorable famille protestante du Yorkshire, l’homme s’est converti au catholicisme à 16 ans, puis a fui l’Angleterre pour aller combattre sur le continent aux côtés des troupes espagnoles contre les Provinces-Unies réformées. Rentré après dix ans passés sur les champs de bataille, celui qui se fait désormais appeler Guido entre en contact avec d’autres catholiques en colère. Ils se convainquent qu’il faut absolument se débarrasser du monarque Jacques 1er, qui depuis son accession au trône en 1604 a réduit au silence à la fois les « papistes » et les puritains protestants extrémistes. En tuant le roi et tous les parlementaires présents, les conjurés espèrent déclencher un soulèvement catholique et ramener le royaume dans le giron de l’Eglise.
Mort infamante
Les conspirateurs ont-ils voulu épargner la vie des catholiques présents au Parlement pour la rentrée solennelle du 5 novembre ? En tout cas, un noble catholique, Lord Monteagle, reçoit quelques jours avant le jour J une lettre anonyme, il avertit les autorités et c’est ce qui conduit à l’arrestation de Fawkes. Sous la torture il donnera les noms des autres conjurés. Condamné à une mort infamante, il sautera de l’échafaud et se brisera le cou.
Les catholiques anglais n’ont pas été victimes d’une répression de masse après l’attentat manqué. Ils ont été fermement invités à pratiquer leur foi en privé et à affirmer leur loyauté envers la couronne. Malgré tout, le pouvoir en a profité pour faire un exemple : Henry Garnet, le supérieur des jésuites – clandestins en Angleterre – est accusé d’avoir été au courant de la Conspiration des poudres et exécuté en 1606. L’un des terroristes en puissance lui avait parlé du projet en confession. Cinq ans plus tard, un autre extrémiste catholique réussira son régicide : c’est Ravaillac, assassin du roi Henri IV. Ce dernier avait mis fin aux guerres de religion, lui qui avait dirigé les armées protestantes, en se convertissant au catholicisme pour accéder au trône de France.
Anti-papisme festif
Il est intéressant de voir ce que la postérité a fait de la Conspiration des poudres, la première tentative d’attentat au sens moderne. Guy Fawkes est chaque année brûlé en effigie lors de la Guy Fawkes Night le 5 novembre dans tous les bourgs d’Angleterre, un moment d’anti-papisme festif. Les enfants réclament des piécettes « for the Guy ». Le nom propre Guy a donné en Amérique le nom commun guy, qui veut dire gars. Il y a certes des « bad guys » mais les Américains s’identifient plus volontiers aux « good guys ». Des bons terroristes ?
Le masque blanc, moustachu et souriant porté par des membres du mouvement des Anonymous, et qu’on retrouve dans différentes manifestations contre le système à travers le monde, est une effigie de Guy Fawkes. Un site complotiste français s’appelle Fawkes News, il a pour slogan « Plus on est de Fawkes moins ils rient ». Un exemple de titre sur leur page d’accueil : «Ebola, une arme biologique US». D’autres conspirationnistes s’inspirent de l’implication supposée des jésuites dans l’attentat manqué de 1605 pour construire tout un édifice de complicités secrètes menant au « jésuito-nazisme » du XXe siècle et à l’infiltration des instances européennes par d’anciens élèves des jésuites, Barroso, Van Rompuy, Draghi et maintenant Jean-Claude Juncker.
Le pape jésuite François pose évidemment un petit problème d’interprétation. Comment peut-il être à la fois issu de cette « sinistre compagnie » et l’un des critiques les plus virulents du système capitaliste ? L’histoire est une farceuse.
SOPHIE GHERARDI | LE 05.11.2014 À 10:17
Pour en savoir plus : http://www.fait-religieux.com