Le laïcisme, religion du siècle

Jean-jaures-foule

Le laïcisme, bien qu’il ne repose sur aucun Dieu, est tout de même issu d’une construction de type religieux

Selon la célèbre phrase attribuée à André Malraux, « le 21ème siècle sera religieux [certains disent mystique] ou ne sera pas ». Pourtant, si « Dieu est mort » comme le proclamait Nietzsche dès 1882 dans Le Gai savoir, il paraît compliqué d’imaginer un siècle religieux.

En effet, la tendance est plutôt à la sécularisation en Occident et parler de religion sans Dieu peut sembler contradictoire. Toutefois, il ne me semble pas déraisonnable d’affirmer que notre siècle est effectivement religieux mais d’un religieux particulier : un religieux sans Dieu.

Une religion sans Dieu est tout à fait possible

Si parler de religion sans Dieu peut sembler surprenant, il existe des constructions de types religieuses sans qu’un quelconque Dieu n’intervienne. L’exemple du marxisme est, à ce titre, significatif. Cette doctrine postule, effectivement, un sens de l’Histoire et l’avènement d’un monde égalitaire dans un horizon lointain. Bien que cette égalité future doive s’accomplir sur la Terre et non dans les cieux, on retrouve bien l’idée d’une orientation de l’Histoire et d’une force mystique qui ferait advenir cette orientation. En ce sens la dialectique hégélienne qui nourrit le marxisme participe pleinement de cette religion sans Dieu qu’est le marxisme.

Le laïcisme est moins une incroyance qu’une foi en l’incroyance

Comme le montre avec brio Emmanuel Todd dans Qui est Charlie ?, le recul du religieux en France se traduit forcément par l’apparition de nouvelles idéologies. En effet, à l’idéologie de la religion vient se substituer une idéologie plus terrestre que céleste. C’est ainsi qu’à l’idéal catholique d’égalité après la mort a succédé l’idéal d’égalité sur Terre qui a débouché sur la Révolution Française.

En ce sens, le laïcisme relève lui aussi d’une construction de type religieux. Souvent défendu par des personnes athées, il constitue bien souvent une foi en l’incroyance plutôt qu’une simple incroyance. Cette foi en l’incroyance se matérialise la plupart du temps par une forme d’intolérance vis-à-vis du fait religieux. C’est ainsi que le livre de Caroline Fourest, L’Eloge du blasphème, est pour moi un livre symbolique de cette nouvelle religion : loin d’énoncer simplement le droit au blasphème, l’essayiste nous fait presque l’injonction de blasphémer pour ne pas trahir la laïcité. Finalement, pour les membres de ce courant, la liberté d’expression c’est surtout d’être libre de penser comme eux et pas autrement. Il y aurait donc des fondamentalistes du laïcisme comme dans toute religion.

Le principal danger de cette nouvelle religion est sa volonté hégémoniste. Les laïcistes voudraient, en effet, nous faire croire que la laïcité c’est le laïcisme. On voit bien, ici, surgir l’analogie avec le prosélytisme des religions catholique ou islamique. Gardons-nous donc de confondre le laïcisme, qui prône l’exclusion de la religion de toutes les institutions publiques et la laïcité, qui est le principe de séparation de l’État et de la religion et donc l’impartialité ou la neutralité de l’État à l’égard des confessions religieuses.

Finalement, si les laïcistes parvenaient à remplacer la laïcité par le laïcisme, cela reviendrait aussi à exclure de toutes les institutions publiques leur doctrine, dont la structure est bel et bien religieuse.

par Newram
lundi 15 juin 2015

 

Pour en savoir plus : http://www.agoravox.fr/

Caroline Fourest se range en faveur des mères voilées

Caroline Fourest
Caroline Fourest

Une nouvelle loi d’interdiction générale du voile pour les parents d’élèves, une bien mauvaise idée. Cette position est formulée par l’une des personnalités les plus impopulaires au sein de la communauté musulmane. En réaction aux derniers propos de Najat Vallaud-Belkacem, qui estime que les mères voilées ont le droit d’accompagner les enfants aux sorties scolaires, Caroline Fourest s’est rangée de son côté en prenant acte de l’avis du Conseil d’Etat à ce propos.

Dans une contribution au Huffington Post parue lundi 3 novembre, l’essayiste déclare s’opposer à l’interprétation d’organisations laïques qui perçoivent la position de la ministre de l’Education nationale comme « une démission du politique et une trahison de la laïcité ».

« Autant, la loi de mars 2004 était tout à fait nécessaire pour sortir du cas par cas et sanctuariser l’intérieur de l’école, autant il faut savoir faire preuve de souplesse quand il s’agit des parents et des sorties scolaires. (…) Elle n’est pas là pour enseigner un modèle absolu mais le droit au doute », juge-t-elle.

« Les élèves ont bien conscience que les accompagnateurs sont les parents de leurs camarades et pas des professeurs. Il n’est pas possible de régir leur mode de vie comme s’il s’agissait d’enfants, d’élèves ou de personnels représentant l’institution. Et d’ailleurs, s’il fallait étendre la contrainte aux parents, pourquoi n’interdire que le voile ? (…) Ajouter une clause qui vise uniquement et spécifiquement la tenue de certaines mères n’aura qu’un effet désastreux et contre-performant. Celui de faire haïr la laïcité », dit-elle également.*

Respecter les choix « même rétrogrades »

A-t-elle changé d’avis sur le port du voile ? Que nenni pour celle qui soutient avec vigueur la loi « émancipatrice » de 2004. « Si la République laïque doit encourager l’émancipation et le respect de l’égalité chez chaque citoyen en devenir, elle doit aussi (parce qu’elle est démocratique) respecter ces choix – même rétrogrades – une fois ce citoyen devenu adulte. Y compris le port du voile tant qu’il ne dissimule pas le visage et ne porte pas atteinte à la sécurité publique », signifie l’essayiste. Ainsi, le choix de porter le voile n’en reste pas moins « rétrograde » à ses yeux.

D’autre part, l’abrogation de la circulaire Chatel n’est pas évoquée comme solution pour mettre fin au traitement différencié des parents.

Plutôt que de légiférer contre les convictions des parents, Caroline Fourest, qui a fait appel de sacondamnation pour diffamation pour ses propos contre une victime d’islamophobie à Argenteuil (Val-d’Oise), préfère « résister à l’inflation d’écoles confessionnelles intégristes, parfois sous contrat ».

Les réactions se multiplient depuis la salutaire prise de position de Najat Vallaud-Belkacem. Les mères voilées attendent désormais d’elle l’abrogation de la circulaire.

* Mise à jour : Dans un entretien accordé à Zaman France en octobre 2013, Caroline Fourest s’est aussi exprimé sur le sujet, en déclarant son opposition à l’interdiction faite aux mères voilées d’accompagner les enfants aux sorties scolaires mais également contre l’interdiction du voile à l’université.

Pour en savoir plus : http://www.saphirnews.com