L’historien et sociologue Emile Poulat, décoré de la Légion d’honneur, le 9 décembre 2012 lors d’une cérémonie à l’Elysée, à Paris (Photo Bertrand Langlois. AFP)
Emile Poulat, figure de la sociologie du fait religieux en France dans la seconde moitié du XXe siècle, spécialiste du catholicisme et de la laïcité, est mort samedi à Paris à l’âge de 94 ans, a annoncé la communauté de Sant’Egidio.
«Avec lui disparaît un illustre savant, une mémoire du XXe siècle et de l’Eglise et un fidèle compagnon de la Communauté de Sant’Egidio», écrit dans un communiqué cette association internationale de laïcs basée à Rome, très engagée dans le dialogue interreligieux.
Né le 13 juin 1920 à Lyon dans une famille très catholique, réfractaire au STO durant la guerre, Emile Poulat a été ordonné prêtre en mars 1945 (BIEN 1945) à Notre-Dame de Paris. Prêtre «au travail» (dans une compagnie d’assurances, un laboratoire d’électrochimie), il partage les positions progressistes des prêtres-ouvriers insoumis à Rome, sur lesquels il écrira plusieurs ouvrages. Rayé de la liste des prêtres du diocèse de Paris en 1954, il quitte le clergé et se marie l’année suivante.
Docteur en théologie en 1950, Emile Poulat a été le cofondateur du premier groupe de sociologie des religions au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) dès 1954, huit ans avant de soutenir en Sorbonne sa thèse d’Etat sur la «crise moderniste» dans l’Eglise, l’un des sujets de prédilection de cet historien du catholicisme contemporain.
Son oeuvre, considérable (une trentaine de livres, des centaines d’articles) et qui couvre plus d’un demi-siècle, s’est aussi focalisée sur l’analyse de la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l’Etat, socle de la laïcité à la française dont il a été un défenseur infatigable, louant son équilibre.
Longtemps directeur de recherche au CNRS (1968-1987) et directeur d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS, 1978-2007), Emile Poulat était officier de la Légion d’honneur, dont le président François Hollande lui a remis les insignes le 9 décembre 2012, jour anniversaire de la loi de 1905. Le chef de l’Etat a salué dimanche matin dans un communiqué «un esprit libre» et «un infatigable défenseur des valeurs de la République».
«Proche de la communauté de Sant’Egidio et de son fondateur Andrea Riccardi depuis les années 1970, Emile Poulat était, avec son épouse Odile, un fidèle participant aux rencontres annuelles de prières et de dialogue pour la paix organisées depuis 1986 dans l’Esprit d’Assise», rappelle pour sa part cette association.
«Intellectuel aussi libre que rigoureux, érudit et homme de foi, Emile Poulat a montré par toute sa vie l’exemple d’un art de l’amitié, du dialogue avec tous et de la paix», ajoute la communauté.
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