Comment la mode « made in Africa » commence à séduire

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Imprimés façon wax, batik ou kasaï, bijoux over size en bois et en perles, accessoires en raphia… chaque été, la mode puise une partie de son inspiration sur le continent africain. Agnès b., Tory Burch, Isabel Marant : les créateurs renouvellent chaque année nos envies d’ailleurs. Parmi cette offre séduisante, combien de marques made in Africa ? Très peu, voire aucune. Paradoxale et complexe, la création africaine se transformera-t-elle un jour en secteur économique capable d’exporter et d’habiller le continent ? Enquête sur une industrie en devenir.

Cet été encore, l’Afrique s’est invitée dans nos vitrines. Par touches subtiles et désirables, les grandes chaînes comme les créateurs ont déclenché nos envies d’évasion. Parmi cette offre saisonnière, de jeunes marques tentent de trouver leur place en louant quelques mètres carrés de vente dans des boutiques éphémères ou des salons. Hâpiface, Moonlook, la Foire africaine de Paris, la Parenthèse inattendue et plus récemment le Labo international (anciennement Labo Ethnik) : à l’approche de l’été, les évènements afropolitains se sont succédé dans la capitale. Entre folklore et tendance afro-chic, cette effervescence créative annonce-t-elle l’émergence d’une mode africaine ou simplement un nouveau sursaut d’un secteur économique qui peine à se structurer ?

Pour Nelly Wandji, qui a cofondé la plate-forme de market place Moonlook il y a un an, l’ouverture d’une boutique éphémère était plus que nécessaire pour valider son approche stratégique du made in Africa. « Avoir un espace de vente physique pendant un mois m’a permis d’avoir une approche pratique de mon activité. Sur un mois, nous avons accueilli 4000 personnes et effectué près de 700 transactions pour un panier moyen de 45 à 65 €. À ma grande surprise, 70 % des clients étaient des Européens et des touristes. » Pour la jeune entrepreneuse, cette expérience a aussi permis de tester le potentiel des 15 créateurs qui ont mutualisé leurs fonds pour participer à cette démarche commerciale. « Que ce soit dans la vente en ligne ou en boutique, je rencontre toujours les mêmes difficultés au niveau de la production, soit en termes de réassort, soit en termes de standards de fabrication. En Afrique, il y a la créativité, mais il manque la production et la stratégie », déplore Nelly Wandji. Comme de nombreux jeunes entrepreneurs issus de l’immigration, Nelly souhaite prendre part au renouveau de l’Afrique. « Mon ambition est de créer de la valeur ajoutée sur le continent, pas de faire un simple business. »

« African dream » collectif

Boostée par un rêve africain collectif, cette jeunesse branchée et entreprenante se retrouve très vite confrontée aux réalités africaines et à leurs difficultés. Consultante en stratégie de marque, Grace Kelly Azizet croit dur comme fer dans l’émergence d’un artisanat de luxe africain lorsqu’elle crée l’agence Wild Flowers en 2011. Après des débuts laborieux, l’agence décroche un premier succès avec la marque de maroquinerie Zashadu. Créée à Lagos par une jeune femme de la diaspora nigériane, l’histoire de cette jeune marque est emblématique des initiatives individuelles qui voient le jour un peu partout sur le continent. Formée à l’architecture et à la mode, sa créatrice, Zainab Ashadu, redécouvre lors d’un voyage le savoir-faire des tanneurs et des maroquiniers de son pays. Fan de mode, elle se lance dans la fabrication d’un premier sac. Lequel suscite très vite l’intérêt de son entourage, qui lui achète ses premières créations.

Convaincue du potentiel de la jeune femme, Grace Kelly Azizet lui propose de l’aider à créer une marque à part entière. Ajustement du logo, image, stratégie retail, communication  : l’agence Wild Flowers structure la stratégie de la petite entreprise d’artisanat. « Zashadu est une marque de luxe durable. Les sacs sont fabriqués dans un atelier d’artisans de Lagos à partir de cuir en python de Sokoto et en crocodile. Le tannage est à 60 % végétal et garanti sans chrome », explique Grace Kelly Azizet. Réputé pour la qualité de ses peaux et son savoir-faire ancestral, le Nigéria approvisionne de nombreuses marques de luxe européennes comme Fendi, Hermès et Bottega Veneta. « Le plus difficile, c’est d’exporter les sacs du Nigéria. Entre la corruption et les problèmes de transport pour ce type de produits, on a encore toute une chaîne de logistique à construire. Mais on y travaille », ajoute la jeune femme, enthousiaste. Distribuée d’abord en exclusivité chez Wolf and Badger à Londres, la jeune marque de luxe créée en 2013 a aussi séduit les Françaises. Les pochettes en cuir irisé vendues cet hiver chez Franck & Fils à Paris ont fait l’objet de nombreuses parutions dans la presse française et internationale. « À la suite d’une dépêche AFP, nous avons enregistré près de 90 parutions presse. Notamment sur votre site, mais aussi dans le Vogue Italie et même le China Post », se réjouit Grace Kelly Azizet. Forte de ce premier succès, la consultante prépare d’ailleurs son prochain colloque sur le luxe durable, qui se tiendra en août en République du Congo.

Continent de savoir-faire et nouvelle main d’œuvre bon marché

Des défilés parisiens au désert du Niger, la créatrice Katherine Pradeau a changé de vie. Partageant depuis dix ans sa vie entre la France et l’Afrique, elle met sur pied son projet d’atelier spécialisé dans l’artisanat touareg.

Loin des visions misérabilistes et des regards condescendants, l’Afrique présente aujourd’hui un nouveau visage et attire les investisseurs, comme le groupe H&M, qui, depuis 2013, a démarré des chaînes de production en Éthiopie et au Kenya. Nouvel eldorado des industriels qui cherchent à réduire leurs coûts de production avec une main d’œuvre bon marché, l’Afrique a pourtant d’autres atouts en main. Découpé en cinq grandes zones géographiques, le continent est un patchwork de cultures et de savoir-faire ancestraux. Peu valorisées et pratiquées dans le cadre d’une économie informelle, ces compétences sont pourtant la clé de la création africaine. Pour la créatrice Katherine Pradeau, qui travaille avec les Touaregs depuis 2005, « il faut agir sur la formation sans dénaturer les savoir-faire africains ». Partageant depuis dix ans sa vie entre la France et le Niger, l’ancienne styliste parisienne est devenue une spécialiste de la culture touareg. « Au départ, on a tout fait pour me dissuader de m’aventurer dans cette partie du Niger, réputée très dangereuse. Mais j’y suis allée et j’ai su me faire accepter. Quand on voyage en Afrique, il ne faut pas se contenter de rester dans les grandes villes. Il faut s’aventurer pour aller à la rencontre des vrais artisans », raconte l’aventurière. Partie pour réaliser une première collection de bijoux et de sacs touaregs, Katherine Pradeau a, depuis, changé ses codes et sa vision de la mode. « On ne développera pas la mode africaine en appliquant bêtement les méthodes occidentales. Ici, il faut penser autrement et surtout former les nouvelles générations », analyse-t-elle. Malgré les embûches, Katherine Pradeau croit plus que jamais au potentiel de l’Afrique.

Tout aussi optimiste, la jeune fondation AfricaFrance (1) souhaite accompagner les pays africains dans la mise en place de structures pour installer durablement le secteur de la mode. Piloté par Laura Eboa Songue, le groupe de travail s’est donné trois missions : la formation, la syndicalisation des professionnels en fédération, l’organisation d’un salon unique destiné à la commercialisation. Pour la jeune femme qui a cofondé le webzine Fashizblack en 2008, « les échanges entre la France et l’Afrique sont quasiment inexistants, à l’exception de quelques marques et distributeurs installés sporadiquement ou des vêtements de seconde main importés en masse sur le continent. On ne peut pas vraiment parler de relations. » Si les liens et les échanges entre l’Hexagone et le continent sont à repenser, il faut aussi faire bouger les mentalités africaines et passer de la culture du créateur à la stratégie de marque. « Actuellement on a affaire à une mode de créateurs et on voit des fashion weeks qui éclosent un peu partout sur le continent ; ça n’a pas de sens. La majorité des stylistes ont une vision à court terme, ils ne comprennent pas le business de la mode. De plus, il y a de très grandes disparités entre les pays francophones et des pays comme le Nigéria, le Ghana, le Maroc ou l’Afrique du Sud, qui sont plus industrialisés et commercialement plus attractifs », estime Laura Eboa Songue. Qu’il s’écrive au présent ou au futur, le carnet de route d’AfricaFrance et de ses partenaires s’annonce chargé. Il faudra attendre encore quelques années avant de pouvoir parler d’une industrie capable d’habiller le continent mais la dynamique est bel et bien en marche.

(1) Présidée par le franco-béninois Lionel Zinsou, cette fondation agit dans différents secteurs d’activité avec un esprit de partage des richesses et des compétences.

Par Stéphanie O’Brien | Le 10 juillet 2015

Pour en savoir plus : http://madame.lefigaro.fr/

Cindy Bruna : « Il y a encore beaucoup à faire pour les femmes issues de la diversité »

CindyBruna

Léger, provocant et hyperglam, ce vestiaire de plein soleil, sublimé par la top Cindy Bruna, s’invite dans les rues colorées de La Havane. Pour faire vibrer toute sa sensualité.

Une mère congolaise et un père piémontais ne pouvaient concevoir qu’un miracle de la nature. Ce miracle s’appelle Cindy Bruna, une beauté française métissée qui conjugue les couchers de soleil flamboyants de l’Afrique avec les crépuscules brumeux s’abattant entre les Alpes et la plaine du Pô, sur le village italien de Demonte. Née dans le Var, Cindy Bruna a hérité du glamour de cette alliance des contraires, avec de grands yeux noirs, un port de sultane, une silhouette de liane faite pour porter les tenues de créateurs.

C’est à 16 ans, alors qu’elle révisait encore son bac et rêvait d’une carrière d’experte-comptable, que la rencontre d’un agent bouleversa la vie de la belle Frenchie. « Pourtant, j’aimais les chiffres et les mathématiques », raconte avec candeur cette nouvelle déesse des podiums. Mais le destin en décida autrement, lorsqu’un après-midi d’été Dominique Savri, scout pour l’agence de mannequins Metropolitan, aperçut sur la plage de Saint-Raphaël une silhouette parfaitement dessinée, comme une esquisse à l’eau-forte, avec ses pleins et ses déliés. « J’ai tout de suite été attirée par la longueur de ses jambes, et lorsque je lui ai adressé la parole, elle m’a offert le plus joli des sourires. » Cindy Bruna monte alors à Paris avec sa mère, qui est légèrement réticente. « Mes parents n’étaient pas d’un enthousiasme fou à l’idée que je me lance dans cette aventure. Il a fallu du temps pour les convaincre que le mannequinat était un vrai métier. »

Des débuts fulgurants

Comme Claudia Schiffer et Eva Herzigova, Cindy Bruna signe avec l’agence Metropolitan et s’envole quelques mois plus tard pour New York. Des débuts fulgurants. D’emblée, elle ensorcelle les plus grands photographes et directeurs de castings. Elle sera la première femme métisse à décrocher une exclusivité Calvin Klein (Cindy en est très fière). « Je crois qu’il y a encore beaucoup à faire pour les femmes issues de la diversité, et j’aimerais un jour que l’on dise de moi que j’ai joué un rôle – même tout petit – pour défendre le droit des femmes, l’égalité dans le monde de la mode. » Quelques mois plus tard, le photographe star Steven Meisel la « booke » en exclusivité pour six mois. L’aventure commence sur les chapeaux de roue. À 18 ans, la voici à la une du Vogue italien et sur la campagne Prada. Elle défile alors pour les plus grands couturiers : Jean Paul Gaultier, Pierre Balmain, Elie Saab. Elle adore ça. « Je me suis prise au jeu. J’aime raconter des histoires au travers des vêtements que l’on me propose de porter. »

« J’ai décidé de prendre des cours de salsa »

Rien ne résiste à la petite Frenchie de Saint-Raphaël, très vite engagée par la célèbre marque de sous-vêtements Victoria’s Secret aux côtés des plus grandes, comme Miranda Kerr ou Karolína Kurková. Cindy Bruna était à Cuba pour le shooting de Madame Figaro. « C’était un voyage magnifique. On danse tout le temps dans ce pays ! J’ai décidé de prendre des cours de salsa. J’ai eu la chance de loger dans le mythique Hotel Nacional, à La Havane, où l’on peut voir affichées dans le hall les photos des grandes figures de Hollywood qui y ont séjourné. »

Aujourd’hui et dans le monde entier, c’est l’image de Cindy Bruna que l’on voit placardée partout. Elle est l’une des égéries des cosmétiques Yves Saint Laurent et, depuis quelques semaines, du parfum Chance de Chanel, campagne réalisée par Jean-Paul Goude. Mais la belle garde les pieds sur terre. Lorsqu’elle ne parcourt pas le monde, elle se ressource le plus souvent possible dans le Sud, auprès de sa famille, elle lit Prévert et la Bible. Voilà Cindy Bruna, l’alliance ultra-glamour des contraires.

Pour en savoir plus : http://madame.lefigaro.fr/

Festival des Musiques Sacrées du Monde : Fès, miroir de l’Afrique

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Fès l’Africaine est le thème de la 21e édition du Festival des Musiques Sacrées du Monde. La cité marocaine accueille, du 22 au 30 mai, une pléiade d’expressions musicales et artistiques sous le signe du dialogue des peuples et des spiritualités.

Vive et accueillante, la ville de Fès, au Maroc, ne révèle pas pour autant ses secrets aisément. Depuis le sommet de ses collines où semblent dormir les tombeaux de la nécropole mérinide (XIIIe-XIVe siècles) s’étend une mer étincelante de toits cuivrés posés sur des murs éclaboussés de lumière, renfermant derrière leur anonymat un patrimoine qui ne demande que du temps pour se révéler aux voyageurs. Fès, qui fut pendant plusieurs siècles une capitale politique et intellectuelle du Maroc, est devenue un centre de rencontres et d’échanges. On raconte que Sylvestre II (Gerbert d’Aurillac), pape de 999 à 1003, y séjourna dans sa jeunesse pour y faire des études, à la suite desquelles il introduisit les chiffres arabes en Europe.

Le Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde, créé en 1994, s’inscrit dans la tradition savante, artistique et spirituelle de la ville. L’ambition du Festival de Fès est de faire dialoguer les spiritualités à travers la musique, et d’aider à faire émerger une culture de paix favorisée par une mondialisation plurielle, respectueuse de valeurs éthiques et spirituelles. Le Festival de Fès a été désigné par l’Onu, en 2001, comme l’un des événements ayant contribué, d’une façon remarquable, au dialogue des civilisations.

Des nuits ouvertes à tous

Cette année le festival, dont Le Monde des Religions est partenaire, s’axera autour de la dimension culturelle africaine de la ville. Durant sept jours, le public pourra jouir d’un florilège d’expressions musicales et d’expositions artistiques où se mêleront sensations auditives et visuelles, ainsi que différentes expériences spirituelles. Au fil des concerts, expositions, activités pédagogiques, programmes dédiés aux plus jeunes ou encore projections de films.

Le festival propose ainsi une évocation à l’Afrique, avec la chanteuse Oumou Sangaré, symbole de la femme africaine libre et porteuse d’émotions, ou le reggae émancipateur de Tiken Jah Fakoly, qui défend toujours les valeurs fondamentales de ce continent. Au programme, des maîtres avérés dans la pratique de leur art avec, entre autres, le grand chanteur romantique Saber Rebaï et sa voix charmeuse et aiguisée, Eduardo Ramos, grand interprète de la musique ibérique médiévale, alliant musique traditionnelle sépharade du Portugal et notes andalouses de pièces musicales arabes, Diego El Cigala, voix majeure du flamenco, issu d’une famille d’artistes gitans ou encore Hussain Al Jassmi, l’une des plus belles voix de la péninsule arabique.

Enfin, tous les soirs auront lieu les Nuits Soufies, afin de clore chaque journée dans une ambiance spirituelle et conviviale. Ces concerts, gratuits et ouverts à tous, donnent un aperçu de la culture islamique à travers la richesse et la créativité de ses dimensions artistiques et spirituelles. Les spectateurs partageront ce moment riche et intense en plein cœur de la médina de Fès.

Sophie Eychenne

publié le 12/05/2015

Pour en savoir plus : http://www.lemondedesreligions.fr

Diversité : mélange explosif ou modèle vertueux ?

Epices

Les adversaires des sociétés multiculturelles ont de quoi se réjouir. Dans de nombreuses parties du monde, au Moyen-Orient (Syrie, Irak), en Afrique (Libye, Mali, Nigeria), en Asie, des guerres civiles font rage, opposant bouddhistes et musulmans, chiites et sunnites, arabes et noirs, chrétiens et musulmans, musulmans et juifs.

La France, on le voit bien aujourd’hui, n’est pas épargnée par une violence à base ethnique et religieuse. Depuis quelques jours, lieux de culte juifs et musulmans sont sous protection policière. Les réseaux sociaux bruissent d’anathèmes entre communautés. Des personnalités telles que Thilo Sarrazin en Allemagne, David Cameron en Grande-Bretagne, sans parler de nombreux politiciens français, proclament l’échec du multiculturalisme. La seule solution pour eux: un modèle d’intégration laïc gommant toute manifestation publique de différence, et notamment de religion.

L’exemple de trois pays d’Asie du Sud-Est permet pourtant de battre cette idée en brèche. En Birmanie, en Malaisie et à Singapour, les Britanniques avaient suscité des mouvements migratoires et la constitution de sociétés « plurielles » afin de nourrir le développement économique de leur empire. Lors de leur indépendance, ces territoires s’étaient donc retrouvés peuplés par des ethnies majoritaires (Bamar au Myanmar, Bumiputra en Malaisie, Chinois à Singapour) mais également des ethnies/religions minoritaires, avec des affrontements violents, culminant dans les années 1960.

Le Myanmar va réprimer, parfois de façon sanglante, les minorités présentes sur son sol, et notamment la minorité musulmane et les ethnies Kachins et Karens, tenues pour responsables de tous les maux. La plupart des descendants d’immigrés indiens et chinois sont expulsés. Les dictateurs combattent la diversité physiquement.

La Malaisie adopte une politique plus ouverte. Les Chinois peuvent continuer à posséder des entreprises. Pour autant, se met en place, dans la foulée des émeutes du 13 mai 1969 (dans laquelle plusieurs centaines de Chinois sont tués), une constitution dans laquelle est gravée dans le marbre la « préférence ethnique » en faveur des Bumiputras, groupe majoritaire dominé du temps de la colonisation. 80% des postes de fonctionnaires leur sont réservés. Des quotas similaires existent dans l’enseignement supérieur, ce qui provoque une émigration de Chinois et d’Indiens, partant faire leurs études à l’étranger.

Singapour prend une troisième voie. Davantage encore qu’en Malaisie, des investissements massifs sont réalisés dans l’éducation, et le pays parie sur la libre entreprise. Mais plutôt que de prendre acte de la domination de l’ethnie majoritaire (les Chinois à 75%), les dirigeants singapouriens mettent en place une politique volontariste imposant la coexistence entre les différentes ethnies, quartier par quartier, immeuble par immeuble. La diversité est célébrée en tant que telle lors d’une journée dédiée, le Harmony Day. Les autres jours de congés nationaux sont ceux des différentes religions en présence (bouddhiste, musulmane, chrétienne). Les enfants sont éduqués dans le plurilinguisme.

Une très grande attention est donnée à l’intégration, avec un soutien systématique des élèves en difficulté (cours particuliers gratuits pour les jeunes enfants qui peinent à apprendre et à lire). Toutes les filières d’enseignement sont également dotées et valorisées. Une construction patiente et systématique d’une identité commune, sans laissés pour compte.

L’exemple de ces trois pays illustre la latitude dont bénéficient les gouvernements pour réprimer les différences, les contenir en les laissant subsister, ou pour en faire un avantage concurrentiel.

Singapour, qui célèbre la diversité et l’éducation, occupe la troisième place dans le classement des pays selon le pouvoir d’achat par habitant du Fonds monétaire international, la Malaisie qui l’encadre par une politique de préférence ethnique est, elle, à la 59ème place. Le Myanmar, qui a longtemps tenté de réprimer dans le sang sa propre diversité, se traîne au bas du tableau à la 161ème place.

La France ne peut plus se contenter de subir la diversité de sa population. Le choix est devant nous. Vivre dans le chaos, exclure les minorités, ou transformer cette diversité en atout.

Pour en savoir plus :  http://www.huffingtonpost.fr